LOFAR

Description

LOFAR (LOw Frequency ARray) est un interféromètre constitué de plus de 50 000 antennes en Europe, dont 60% aux Pays-Bas, réparties en 52 « stations ». Il est en exploitation scientifique depuis 2012. Une des stations de LOFAR, la station LOFAR FR606, est située à Nançay. Elle est constituée de 2 réseaux d’antennes et d’un container rassemblant les récepteurs et l’informatique. La plupart des observations se font en réseau avec les les autres statons LOFAR ; pour cela, la station est connectée à un superordinateur central à Groningen aux Pays-Bas. D’autres observations n’utilisent que la station LOFAR FR606 ; on parlera d’utilisation locale.

Les objectifs scientifiques-clés sont un survey profond du ciel, l’étude de la réionisation de l’Univers, des sources variables telles que pulsars, jets, étoiles éruptives, planètes et exoplanètes, la détection des rayons cosmiques de très haute énergie, et la physique du milieu interplanétaire.

Domaine de fréquences : 10 à 270 MHz

Contact : P. Zarka, M. Tagger, C. Dumez-Viou, J.-M. Griessmeier

Historique

Bien que la Radioastronomie soit née dans les années 1930s des expériences de Jansky vers 20 MHz, elle s’est beaucoup développée aux plus hautes fréquences (1 GHz et plus). La radioastronomie basse fréquence est longtemps restée limitée à un nombre d’instruments très limité, et s’est habituellement concentrée sur les sources les plus intense. La gamme des basses fréquences radio reste donc un domaine largement inexploré en astrophysique.

Vers le milieu des années 1990, de nouvelles méthodes ont été mises en œuvre, ouvrant des perspectives nouvelles en imagerie basses fréquences. Ceci, et la forte croissance des puissances de calcul disponibles ont fait germer l’idée d’un très grand réseau basses fréquences, et a donnée naissance aux projets LWA aux Etats-Unis, MWA en Australie, et LOFAR en Europe. La station LOFAR de Nançay a été inaugurée en 2011, et le réseau LOFAR est entré en phase d’exploitation scientifique en 2012.

Caractéristiques techniques

Les stations internationales

LOFAR consiste en 52 stations au total, dont 38 se situent aux Pays-Bas. A celles-ci s’ajoutent 14 stations internationales, dont une en France (Nançay).

Ces stations internationales ont un rôle important : Non seulement qu’ils ajoutent leur surface collectrice, augmentant la sensibilité du réseau LOFAR, mais elles fournissent des lignes des base très longues. En utilisant ces lignes des bases, on améliore la résolution angulaire des images (c’est à dire leur finesse) d’un facteur 10 !

Pointage du télescope

LOFAR est un interféromètre, c’est-à-dire un ensemble de grandes antennes radio, dont la combinaison des signaux reçus permet de reconstituer des images du ciel radio basse fréquence. Contrairement aux radiotélescopes plus classiques, LOFAR n’a pas de parties mobiles. Cela ne veut pas dire qu’on ne peut pas « pointer » le télescope (c’est à dire de choisir la direction dans laquelle on observe) ! Pour LOFAR, le pointage se fait par un traitement numérique : les signaux de certaines antennes sont retardés par rapport aux autres. Le choix précis de ce retard définie la direction d’observation. C’est entre autre pour cela qu’on parle d’un télescope numérique.

Les antennes LOFAR

La station LOFAR FR606 est constituée de deux champs d’antennes ; uniquement l’un des deux champs est utilisé.

Le champ d’antennes « basse fréquence » contient 96 antennes couvrant la gamme 10-90 MHz.

Elles sont chacune formée de 2 dipôles « en V inversé » croisés, de manière à être sensibles à 2 polarisations linéaires orthogonales des ondes reçues.

 

Le champ d’antennes «haute fréquence » contient 1536 antennes couvrant la gamme 110-270 MHz.

Ces antennes sont regroupées en 96 groupes (« tuiles ») de 16 antennes (des dipôles croisées comme les antennes « basse fréquence », mais de taille plus petite).

Les récepteurs


Les signaux des antennes passent par les récepteurs radio numériques (96 au total), échantillonnant le signal des antennes à 200 MHz (200 millions d’échantillons / seconde), puis le combinant pour former un ou plusieurs faisceaux simultanés sur le ciel.

Le signal résultant est habituellement envoyé au super-ordinateur central de LOFAR à Groningen (Pays-Bas) via une fibre optique de débit > 3 Gbits / seconde. Ce super-calculateur va ensuite combiner les signaux de FR606 avec ceux des autres stations LOFAR.

Programmes scientifiques

LOFAR est un radiotélescope extrêmement flexible, et peut servir à des études scientifiques très variées. On peut citer, a titre d’exemples, la formation des galaxies, amas de galaxies et grandes structures de l’Univers, le champ magnétique dans notre propre galaxie aussi bien que dans des galaxies lointaines, la cartographie profonde du ciel radio, l’étude du Soleil, la détection des rayons cosmiques de très haute énergie et celle de milliers de sources transitoires et rapides comme les pulsars, les explosions d’étoiles, les trous noirs … et peut-être même les exoplanètes.

Les rayons cosmiques

Directions d’arrivée des rayons cosmiques détectés avec LOFAR entre juin 2011 et avril 2013. Croix bleue: direction du champ magnétique.

Les rayons cosmiques de très haute énergie, témoins des phénomènes les plus violents de l’Univers, sont observés par les gerbes de particules qu’ils produisent lorsqu’ils pénètrent dans l’atmosphère. Ces gerbes produisent un intense signal radio dont l’observation vient en complément aux techniques plus classiques de détecteurs de particules.

Le Soleil

Sursauts radio dans la couronne solaire observé à 30 MHz.

LOFAR a été utilisé pour observer le Soleil, plus précisément des sursauts radio liées à des éruptions solaires. La localisation des sursauts sur des images radio permet de suivre le mouvement des électrons dans la couronne solaire.

Référence : D. E. Morosan et al., LOFAR tied-array imaging of Type III solar radio bursts, Astronomy & Astrophysics, 568, A67, 2014.

 

Les planètes

Vue d’artiste

Avec LOFAR, les astronomes tentent de détecter pour la première fois l’émission radio des exoplanètes, porteuse d’informations uniques sur le champ magnétique, la rotation et l’inclinaison de ces objets, les interactions électromagnétiques étoile-planète. Cela permettra d’élargir considérablement le cadre de la physique magnétosphérique comparative (les magnétosphères des planètes du système solaire sont toutes très différentes les unes des autres).

Les pulsars

crédits SKA

Quand la station LOFAR de Nançay n’est pas connectée au réseau LOFAR international, elle sert principalement aux études de pulsars. Un pulsar est une étoile qui a explosé, en éjectant une grosse partie de sa matière. C’est une “supernova”. Il reste une étoile dont la matière est dégénérée, très petite et tournant très vite sur elle-même. Elle émet du rayonnement dans un pinceau étroit et si la Terre est bien placée, elle reçoit à chaque tour une impulsion d’ondes.

Avec LOFAR, on étudie le rayonnement des ces objets, puis les modification que ces ondes radio subissent en traversant l’espace. On peut donc se servir des pulsars pour étudier le milieu interstellaire ionisé.

Les galaxies

Bien que le ciel soit relativement bien connue en lumière visible, il l’est beaucoup moins en radio basse fréquence. En cartographiant le ciel avec LOFAR, les astronomes font parfois des découvertes surprenantes, comme celle d’une radiogalaxie géant précédemment inconnue. Elle mesure plus de 8 millions années lumière – il s’agit d’une des plus grandes radiogalaxies géantes connues !

Référence : A. O. Clarke et al., LOFAR MSSS: Discovery of a 2.56 Mpc giant radio galaxy associated with a disturbed galaxy group, Astronomy & Astrophysics, 601, A25, 2017.

La cosmologie


L’un des objectifs majeurs de LOFAR concerne la cosmologie : il s’agit de la détection du rayonnement émis à « l’époque de la réionisation » de l’Univers. Lors de l’émission du rayonnement cosmologique à 3 °K, l’essentiel de la matière de l’Univers s’est « recombinée » sous forme d’atomes d’hydrogène neutre. Quelques centaines de millions d’années plus tard, les premiers objets lumineux se forment et leur rayonnement commence à « ré-ioniser » la matière. Ces objets sont-ils des étoiles, des galaxies, des amas ? A quel moment précis cet évènement a-t-il eu lieu ? LOFAR tente de répondre à ces en observant le rayonnement de l’hydrogène neutre (non réionisé). Ce rayonnement est émis à 1420 MHz aujourd’hui, mais des ondes émises dans le passé sont observés à des fréquences de plus en plus basses à mesure que l’on s’enfonce dans le passé.